Stigmata Doloris 2008



Le lendemain soir, une chaleur me barbouille le ventre…
J’en rêvais…elle me faisait fantasmer à chaque fois que j’en voyais une sur le net.
Une demande timide de ma part pour savoir si tu accepterais de me faire découvrir cette sensation…
Après bien des recherches, tu t’appliques à me poser sur la tête la cagoule interdite. Un regard furtif avant pour savoir à quoi elle ressemble…un dernier face à face angoissé et excité et en toute confiance je vois que le jour décroît et que la nuit augmente…
Un noir intense accouplé à ma privation de parole.
Je tortille encore mes doigts pour essayer de glaner des parcelles de lumière vivifiantes mais l’univers visuel se dérobe à moi.
Mon museau s’agite frénétiquement et intériorise son odeur.
Les lanières m’emprisonnent la tête, mes pensées se retrouvent elles aussi comme dans une cage dorée où seul mon corps sera le garant de mes émotions futures.
Je déteste cette incapacité à faire valoir mes droits de manière orale, je n’y suis pas habituée et je me surprends à me dépasser dans ma gestuelle pour te faire ressentir que le plaisir est bien là. Je m’ouvre à toi d’une autre manière.

A quatre pattes, j’écarte les jambes et laisse mes orifices devenir la première ouverture sensorielle à des délices plus succulents dont tout mot viendrait à en casser le charme s’il était prononcé…
C’est à toi de repérer les signaux de détresse, les cris de s.o.s ou les envies sans limite qui me submerge tel un raz de marée envahissant.
D’ailleurs mes sucs ne se gêneront pas de se déverser en attendant d’être recueilli par un Maître assoiffé de sensualité.
Un chemin vers une complicité à l’état brut.

Je me laisse un temps de réflexion où je remarque que je redoute plus tes gestes en plongeant mon regard dans tes yeux gris perlés que lorsque la nuit devient mon univers et la lune imaginaire mon seul point d’attache avec toi…
Troublant, exaltant, agaçant parfois et surtout contradictoire et paradoxale.
Je ris intérieurement de retrouver ces deux derniers mots si représentatifs de ce que je suis…
Je ne me fais donc moins de souci et je laisse l’étau qui encercle mes tempes reprendre leur rôle initial.
Je redoute toujours le moment où d’une manière ou d’une autre tu atteindras la zone de mon sexe.
Ma parole était pour moi le seul moyen d’évacuer le stress.
Je pouvais à tout moment dire « stop arrête ! » ou alors même te rejeter très vertement.
Avec un tel attirail, je suis obligée de me faire violence pour ne pas gémir, pour te laisser prendre les commandes sans en être révulsée et je dois reconnaître que je ne pourrai peut-être plus anticiper mais juste me laisser gagner par les émotions.

Ta voix se répercute d’une oreille à l’autre.
Je te cherche, tourne instinctivement la tête.
Je me dandine pour retrouver une bribe de ton corps et m’y cramponner.
Je ne sais pas où je vais…toi seul le sait…
Des bruits viennent troubler mon attention première.
Un coup de martinet, des fesses qui se contractent et un enivrement qui me fait fondre…Un jeu dont je ne connais pas la durée mais qui se terminera en mouvements de mâchoires intensifs avant de passer sans intermède à un jeu un peu plus angoissant mais si excitant….la bougie…

Me voilà à nouveau couchée sur cette étendue cotonneuse rouge.
Je me rattache à cette couleur, symbole de la passion, de l’amour mais aussi de la colère et du sang.
Ce flux qui palpite dans mes veines, qui me rend si vivante et morte à la fois.
La découverte des mes sens se poursuit…
Mon poignet droit se retrouve menotté au pied de mon radiateur.
Son jumeau subira le même sort.
Drôle se sentiment de se dire que quoi que je fasse, je ne pourrai jamais arracher ce radiateur du mur et m’échapper…
Me voilà prisonnière d’actes cajoleurs, enfermée dans une chaleur latente d’être aussi vulnérable.
Ma poitrine frappe mon c½ur de cette perte de liberté…
Puis on cerveau, mes sens et ma soumission éclate d’un feu jouissant de me savoir offerte.
Tu ne me prives pas de la vue et je veux te sentir sur moi.
Savoir que malgré mon incapacité à te caresser, je suis encore désireuse d’enfouir ma langue dans ta bouche et de raviver cette complicité du moment.
Je cambre mon corps pour ne sentir plus que toi, pendant que tu mordilles ma poitrine si sensible et que je succombe sous des râles de plaisir…
Chaque morsure est un frisson ardent, ma tête part en arrière, mes yeux se ferment et je pars à la recherche de sensations nouvelles.

De temps à autre, un « Tu es belle ! » me fera sortir de ma sphère et te sourire timidement.
Tu explores mon ventre, écartes mes cuisses…
Je me retrouve comme clouée sur une croix, en offrande, prête à tous les sacrifices pour nous sentir vivre silencieusement.
Ta langue fourche tendrement mon sexe et le sang me monte à la tête...
Je panique intérieurement.
Je recherche à m’enfuir de ces flashes tortueux, je fais silence de peur de te perdre avec mon passé si cruel mais je n’y arrive pas…
Je me crispe…Sans pouvoir bouger, je te hurle : « Je t’en prie apprivoise-moi ! Ne vas pas si vite ! »
Je gémis d’une peur viscérale alors que tu n’as jamais été aussi doux et attentif à mon vécu qu’en ce moment…
Je n’entends plus qu’un : « Arrête ! »
Je comprends ta réaction.
J’ai remis en doute une fois de plus ta capacité à ne pas effaroucher la jeune louve craintive.
Je m’en veux de ne pas t’avoir encore une fois ré expliqué mes réactions face à cette envie de découvrir mais qui me tétanise malgré tout sur place une fois le moment venu…
Le son de ta voix me fait trembler et je commence à tirer sur les menottes. Je transpire, je deviens folle…

Puis une bouffée de plaisir me submerge…Que m’arrive-t-il ?
Ta langue apprivoise mon sexe humide comme je te l’avais demandé, j’oscille entre crispation de peur et délivrance de plaisir.
Ce contact mouillé et ton souffle chaud sur mon entrecuisse me fait frissonner.
Le plaisir se gradue et mon te l’échelle de l’indécence à une vitesse vertigineuse.
J’ai mal à la nuque de regarder tes allées et venues le long de ma jambe pour revenir courageusement apprivoiser mes lèvres.
A chaque fois la même réaction : une crispation puis un relâchement des muscles avant de partir pour l’inconnu.
Je me cambre, me tortille pour échapper à cette peur et à la fois je m’ouvre encore plus pour te sentir me fouiller plus outrageusement.
Ma tête part dans les coussins, les veines de mes poignets font jaillir la puissance de ce plaisir inconnu…
Je n’ose te demander d’arrêter car je savoure cet instant même si je ne le comprends pas.
Je finirai par hurler : « Mais qu’est-ce qui m’arrive. Je ne gère pas ! »
Je n’arrive plus à contrôler mes sens alors que j’ai passé ma vie à anticiper et gérer tous mes moindres faits et gestes.
Tu commences à dompter l’inaccessible au commun des mortels…
Je finirai par me détendre et je ressens le frisson de terreur transformé en douceur quand ta langue obtient la clé de la vierge tétanisée…
Mon souffle devient court, ma respiration est saccadée et je ne peux en supporter davantage.
Tu viens de franchir de ta langue mes lèvres et l’effort pour moi est cependant surhumain…
Je te fais comprendre mon désir de faire une pause…
L’intensité de ce corps à corps me bouleverse et la tension se relâche.
Je ne suis qu’un pantin sans fil dont le cerveau essaie d’assimiler toutes ces sensations, dont le c½ur n’est que palpitations irréfrénées et dont le corps n’est que volcan en fusion.  
En te retirant, tu acceptes mes limites, les respectent malgré la désolation qui me gagne de n’avoir pu t’offrir plus…

Ton souffle sur moi réchauffait mes sens et me voilà à nouveau transi de froid de te voir t’éloigner.
Les bougies ambiantes ne calmeront pas mes frissons et ta voix hypnotique aiguisera mon incompréhension…
Tu es en train de faire naître des flammes chocolatées et je te souris.
Puis la Saint-Cyr entre en action.
Penché au-dessus de moi, tu allumes une longue bougie blanche…
C’est impossible je n’y arriverai pas !
Je suis tétanisée sur place.
La confiance que j’avais en toi m’avait fait oublier mes bras menottés.
Je me débats, je panique.
Une envie de pleurer comme une gamine perdue et incomprise me soulève la cage thoracique.
Je retrouve cette peur viscérale qui m’empêche tout raisonnement logique.
Ma sérénité de me savoir soumise en prend un coup.
Je ne sais que faire ni que dire pour te faire stopper ma peur…
J’essaierai de me dégager…en vain…Je tenterai les mots : «  Non pas ça, je t’en supplie ! »
Mais ils sont encore plus faibles que moi.
Je me battrai encore en essayant de leur donner de la puissance et de l’impact : « Grand Nord, s’il te plaît non ! Je t’en prie ! »
Mes yeux pleurent intérieurement de peur…

Mais il est trop tard…Les gouttes de cire se liquéfient, se délectent de leur chute avant de venir épouser mon ventre.
A chaque brûlure une grimace, une incompréhension de ma part d’avoir voulu vivre cela…
Une limite de dépassée, une curiosité découverte et un avis mitigé.
Tu liras une telle terreur dans mes yeux comme encore jamais vu auparavant et tu éteints de tes doigts la flamme de mon enfer.
Un regard, un silence…Un merci muet de m’avoir fait toucher du ventre une nouvelle inconnue et un dégoût de moi de t’avoir fait croire durant notre attente que le jeu en vaudrait sûrement la chandelle…
Je me sens penaude, triste d’avoir à nouveau bafoué une envie commune.
Tu ne peux oublier si vite cet instant et tu prendras quelques clichés de ces perles parsemant mon tour de nombril.
Je me retrouve en terrain connu.
Le clic des photos me rappelle la malédiction de mon charme naturel et je laisse la photogénie corporelle reprendre ses droits.

Allongé à mes côtés, je te murmure : « Je suis désolée, je pensais que j’aimerais… » et j’enfouis mes larmes dans le creux de moi-même…le pelage du chat à neuf queues et tes morsures viendront me nettoyer de toutes souillures cireuse et me rendre à nouveau vierge de nouvelles sensations…
Par la suite, je verrai les photos et un sentiment de profonde gratitude me parcourra. En effet, la frustration de ne pas pouvoir goûter à cette nouvelle alchimie aurait sans doute été dure à vivre…
Je ne regrette rien, au contraire…
Avec du recul, je me dis que de ta savoir au-dessus de moi à écouter mon envie secrète cachée derrière un mur de terreur a été un signe de la maîtrise totale de mon loup et qui n’a fait que renforcer ma confiance en toi.
Je suis prête à recommencer un jour et d’un regard malicieux, je te dirai encore : « J’ai envie d’autres sensations fortes ! » et je verrai tes yeux gris perlés me répondre en souriant…

Puis, la saveur de cette connivente soumission prendra une toute autre teinte.
Je ne me sentais peut-être pas assez femelle ou tu n’avais pas compris mon désir de toi…
Malgré mes incapacités à être un fruit de plaisir pour toi, j’essaie de combler ce vide en étant une soumise désireuse de vibrer à tes côtés.
Un regard, le noir se marie au gris perlé, et je puise plus loin dans mon sang cette gifle qui te meurtrira la joue.
Et en provocant ce duel charnel, j’ai goûté à l’imprévu…
Tu as fait naître deux chaleurs, deux terreurs, deux joues embrasées d’instants différents et un souffle coupé face à l’insaisissable réaction confuse…
Je ne savais plus qui j’étais, une humiliation titanesque de me lover dans les bras de mon bourreau sous les compliments susurrés au creux de mon oreille.
Une peur de ta part de croire que l’agressivité gratuite pour provoquer cet éphémère instant était la naissance de ma trouble jouissance.
Car à ma manière avec mon vécu et mon ressenti, j’ai joui.
J’ai atteint une forme orgasmique qui me laisse pantelante de désir, dans un état second.
La soumise que je deviens ressent la force de dire à son Maître au-delà de la peur primale : « Prends-moi, écarte-moi les jambes et pénètre-moi… » Ou encore d’être capable de faire jouir le mâle juste par la puissance de sa voix et de mon regard.
Je deviens insatiable de goûter cette compréhension.
Tu as su y mettre la force, l’intonation, le désir et l’imprévu pour faire de moi une parfaite soumise même si je ne te dirai Maître que plus tard.

La dernière gifle de la soirée fera naître la peur et le dépassement des limites.
Mes yeux ragent, mes muscles se contractent et le bruit retentissant atteindra par la même occasion mon ½il droit.
Une étincelle blanche jaillit du noir et je te hurlerai contre mon gré en sachant tout le bien que cela me procure : « Ne refais plus jamais cela ! »
Le temps nous a volé de la douceur pour faire face à un plaisir démesuré et incontrôlé.
Tu te retournes en me disant que tout s’arrêtera là et tu t’emmitoufles sous la couette. De mon côté, je me sens seule et vivante à la fois.
Le manque de ta chaleur corporelle me fait frissonner et je ressens plus fortement cet abandon de soumise.
Je te laisse dans ton coin malgré un certain trouble d’avoir perdu quelque chose et je me grille une cigarette.
Ma fenêtre est ouverte, je sens le froid mordant caresser ma peau et la lune brille si intensément que je ne peux en détacher mes yeux.
La nuit est noire et elle reflète mes courbes dans mes pensées silencieuses…
Pour la première fois, le germe de soumission est arrivé à maturation…

Je vibre de toi et je veux te le dire…
J’ai peur en m’approchant que tu me rejettes et sans chercher à me coller contre toi, je te murmure à l’oreille : « Je t’aime comme j’ai rarement aimé des hommes, comme une soumise aime son Maître, comme une fleur fragile aime Coeur de loup. »
Je retiens mon souffle…
J’ai osé dire le mot « Maître » et reconnaître de toutes les fibres de mon corps que j’étais ta soumise…
J’ai vibré et maintenant j’attends angoissée ta réaction.
Le silence qui s’est installé pouvait être méditatif ou distancié  et je ne savais duquel il s’agissait.
Tu te retournes, m’enveloppe sous la couette, m’embrasse et me dit : »Merci d’être revenue ! »
Je me serre plus fort contre toi, l’angoisse de te perdre me lacère la gorge et les souvenirs de ces mois d’attentes de toutes ces larmes de peur que ce n’était qu’un leurre me reviennent à l’esprit…
Grâce à l’alliance des mots, on comprend nos faiblesses, nos limites, nos envies enfouies.
Et dans les bras l’un de l’autre, corps contre corps, ton bassin collé contre ma croupe, une main sur mes seins et l’autre posée délicatement sur celle qui protège ma fleur avant de te céder la place, c’est ainsi que l’on s’endort à l’unisson de nos respirations et envies communes…
Lun 18 aoû 2008 Aucun commentaire