Stigmata Doloris 2008




Sm Rechter.

 

Le cinéma en Belgique ne se quantifie pas par les productions des frères Dardenne et les pitreries d’un Benoît Poelvoorde.

 

Il existe d’autres circuits, d’autres productions tant au Nord (flamand) qu’au Sud (francophone).

 

C’est donc un peu par hasard que lors d’un déplacement à Bruxelles, j’ai été interpellé par l’affiche un tantinet racoleuse du film « Sm Rechter ».

 

Un juge enlaçant une jeune femme partiellement dénudée et ayant tout deux des accessoires et autres ornements tirés de l’univers du « sm ».

 

Cette affiche a directement fait appel a un souvenir de la fin des années 97, ou en Belgique, suite à l’affaire Dutroux, une vaste « chasse aux sorcières » avaient été déclenchée histoire de laver plus blanc que blanc…

 

C’est ainsi qu’un juge du nord du pays, flamand, avait été traîné par ses pairs au devant d’un public friand d’affaires à scandales et autres mises à mort…

 

Si pour une petite partie de la population, le fait que ce juge pratiquait le « sm » avec son épouse ressortait de la sphère privée et n’avait pas lieu à un procès « inique », pour une partie importante de la population, le raccourci simpliste « sm » = « pervers » =  « pédophile » avait été fait par une presse avide de sensationnalisme.

 

Il y eut un procès, plutôt un règlement de compte, une façon de donner en pâture une victime, l’arbre qui cache la forêt.

 

Et ce n’est pas les recours engagés par la suite auprès de la Cour européenne des droits de l’homme qui a pu clarifier la situation.

 

Bref, cette histoire avait en son temps jeté un trouble et surtout la confusion… de quoi lors de mon divorce me voir étiqueter comme pratiquant « sm » (ce que je n’ai jamais nié), donc forcément « pervers » donc « pédophile »… une façon de procéder assez simpliste ceci-dit mais suffisante pour encombrer les tribunaux belges pendant quelques années.

A ce prix là, la variante actuelle en France (2009) de dénoncer son ex-époux pour « terrorisme » a au moins la valeur d’être un tantinet plus « classe » et « rapide ».

 

Je dois dire que je ne connaissais pas du tout le film et que probablement je ne risque pas de le voir sur les écrans francophones du sud du pays.

La seule possibilité est donc de le visionner dans sa version originale sous titrée en français, version que l'on peut voir exclusivement au complexe Kinepolis Bruxelles.

On pourrait donc s’attendre à le voir éditer en DVD ou alors dans des salles d’un circuit parallèle d’art et d’essai bien plus tard.

Je poste tel quel les deux critiques en français trouvé dans la presse belge, critiques relativement objectives mais qui du coup me fait regretter le fait de ne pas comprendre la langue de « Vondel » (dramaturge hollandais, 1587-1679, tout comme on parle de la « langue de Molière » et de « langue de Shakespeare » pour évoquer le français et l'anglais, on parle généralement de la « langue de Vondel » pour désigner le néerlandais).

SM Rechter

Pays : Belgique (2009)
Date de sortie : 11 Mars 2009 | Durée : 90 minutes

Réalisé par Erik Lamens

Avec : Gene Bervoets, Veerle Dobbelaere, Tom Waes, Axel Daeseleire

 

http://www.smrechterthemovie.be/

 

 

«  Quand le mariage de Magda et Koen semble menacé, ce dernier veut essayer de tester ses propres limites.

Ensemble ils découvrent ses désirs cachés.

Koen n'aurait jamais pensé que le SM pourrait le mener vers un mariage heureux.

Quand Magda va de plus en plus loin dans la recherche du plaisir extrême, le couple se retrouve pris au piège dans un enchevêtrement de salauds, gendarmes mouchards et collèges envieux.

SM-rechter est l'histoire d'amour d'un homme prêt à tout pour le bonheur de sa femme, et qui dépasse ainsi peu à ses propres limites.

C'est aussi le récit d'une société qui n'est pas encore prête à accepter l'amour extrême entre deux êtres. »

 

 

 

Juge et Bourreau…

 

De plus en plus fréquente sur nos écrans dès que la lumière s’éteint et que le film commence, la fameuse mention « adapté / tiré / inspiré d’une histoire vraie » est devenue, depuis quelques années, une expression consacrée, un argument commercial indéniable, mention attribuée bien souvent à des œuvres s’inspirant de faits-divers ou d’histoires à la véracité plus que douteuse. D’ici à ce que des producteurs malins tentent de nous vendre un Curious Case Of Benjamin Button comme « inspiré d’une histoire vraie », il n’y a qu’un pas…

Les Frères Coen eux-mêmes, grands farceurs devant l’éternel, s’amusèrent avec ce phénomène à la mode puisque la sacro-sainte mention apparaît dès les premières images de Fargo… un scénario sorti de toutes pièces de leur imagination débordante.

 

Si le cinéma s’est toujours inspiré de la réalité et que le débat « Is it life imitating art or art imitating life ? » a encore de beaux jours devant lui, on ne peut s’empêcher de penser que l’essor malsain de la télé-réalité et sa célébration de la médiocrité sont à l’origine de la prolifération débordante de ces films-témoins puisant leurs sujets dans la réalité, non pas historique mais quotidienne.

Le danger étant de voir les faits-divers les plus sordides adaptés à l’écran sous le prisme du grand spectacle, de la vulgarité, de la manipulation des faits (édulcorés pour le PG-13 ou exagérés pour la version interdite aux moins de 16 ans) et de l’iconisation à outrance des « petites gens ».

 

 

La grisaille quotidienne n’est-elle pas l’antithèse parfaite du Technicolor et du Cinémascope ? Comment rester digne et fidèle à la réalité tout en assurant le spectacle mais sans forcer le trait ?

Comment adapter la réalité à l’écran sans dénaturer le propos, tout en faisant du vrai cinéma ? En 1999 déjà, Gene Bervoets, improbable héros de ce SM-Rechter apparaissait dans Shades, une œuvre (médiocre certes) qui posait la question de la responsabilité des cinéastes vis-à-vis des « vraies » personnes qu’ils dépeignent à l’écran.

Aujourd’hui c’est à son tour d’incarner un juge bien réel et surtout, toujours bien vivant !

Avec SM-Rechter, le problème de la dramatisation romancée ne se pose pas vraiment, malgré des faits avérés, inspirés directement d’une affaire judiciaire ayant fait la Une des gazettes belges en 1997.

Une affaire tellement édifiante, révoltante et confinant à l’absurde que l’on pourrait la croire inventée de toutes pièces !

Si le titre du film et son affiche particulièrement racoleuse peuvent faire penser aux œuvrettes panpan-cucul du petit Jesus (Franco) des années 70/80, il n’en est rien.

SM-Rechter (Le juge sado-maso !) évite, avec bonheur, tous les pièges du voyeurisme et du racolage en se concentrant, avant tout, sur le portrait humain et bourré d’un humour en demi-teinte d’un homme (et de sa femme) tombés dans un engrenage aussi injuste que ridicule, presque kafkaïen.

Du pain béni pour des cinéastes comme Orson Welles, Terry Gilliam ou Milos Forman, habitués à conter des histoires de Don Quichotte moderne se battant contre des moulins, a priori invincibles.

Toutes proportions gardées (le premier film d’Erik Lamens n’étant pas à proprement parler un chef-d’œuvre), SM-Rechter s’apparente finalement, sans trop de difficultés, à un Larry Flynt à la belge…

 

1991. Koen Allegaerts, du tribunal de première instance de Mechelen (note : petite ville située en flandre), est un juge réputé particulièrement sévère au sujet de la prostitution.

Marié depuis 15 ans et père d’une petite fille, Koen vit une petite existence tranquille et sans vagues.

Depuis quelque temps pourtant, son mariage bat de l’aile et son épouse Magda, l’œil hagard et la croupe en berne, souffre d’une grave dépression.

Une thérapie plus tard et Magda se décide enfin à expliquer à son cher et tendre le désir qui, depuis très longtemps, l’habite : Magda a des fantasmes masochistes, l’envie d’explorer l’univers des clubs sado-maso et surtout, le désir d’être dominée le plus violemment possible par un époux dont elle est toujours follement éprise.

 

D’abord choqué et réticent à la requête de sa femme, Koen, au pied du mur, comprend que, pour sauver son mariage, il n’a pas le choix.

Il devra, petit à petit, apprendre à manier le fouet et la cravache à lanières cloutées et faire de sa femme son esclave.

Le couple se lance alors dans une quête qui leur ouvre les portes d’un monde inconnu, fascinant et terrifiant à la fois.

Au fil des ans, Koen et Magda deviennent donc des habitués des clubs sado-maso de toute la Belgique.

Alors que Magda retrouve le sourire par l’assouvissement de ses désirs les plus violents et qu’elle susurre à son beau tortionnaire « fais-moi mal Johnny », le couple revit véritablement. Une renaissance fabuleuse, à la grande surprise de leur fille Iris ignorant évidemment les raisons de cette passion renouvelée.

Tout va donc pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où… la police met la main sur des clichés de Magda pris lors d’une session particulièrement extrême dans un chalet des Ardennes.

Le genre d’images à faire défaillir Monsieur le curé !

Le domicile de Koen et Magda est perquisitionné et des bandes pornographiques dans le plus pur style Hellraiser sont confisquées comme pièces à conviction.

Malgré les protestations de Magda, Koen est arrêté, suspendu de ses fonctions, accusé de coups et blessures et tortures envers sa femme ainsi que d’incitation à la prostitution.

La presse est alertée et le juteux scandale du « SM-Rechter » éclate au grand jour.

 

Quelques mois seulement après l’affaire Dutroux, les autorités belges ne peuvent permettre un nouveau scandale d’ordre sexuel.

Iris, choquée, quitte le domicile familial et refuse d’adresser la parole à son père.

Koen et Magda perdent tous leurs biens et, en véritables parias, sont montrés du doigt… en attendant le procès.

Alors que Koen, placé en garde-à-vue, s’apprête à rôtir sur le bûcher médiatique, il fait une tentative de suicide.

Magda s’adresse alors aux médias, accusant à son tour l’état inquisiteur de s’introduire dans la chambre à coucher des citoyens.

L’opinion publique s’empare de l’affaire et le débat fait rage. Koen et Magda vont bientôt se rendre compte que, comme le disait ce cher Georges : « non, les braves gens n’aiment pas que / l’on suive une autre route qu’eux. »…

La réussite majeure d’Erik Lamens est d’avoir su aborder un sujet susceptible de virer au sordide avec beaucoup de légèreté, d’humour et une tendresse infinie envers son personnage principal, ce juge un peu dépassé par les événements et qui, par amour et uniquement par amour, va passer outre ses préjugés initiaux pour retrouver la complicité de sa femme.

Un rôle interprété à la perfection par Gene Bervoets, excellent acteur habitué des films d’Erik Van Looy (Shades, De Zaak Alzheimer et le triomphal Loft !) : entre maladresse et tendresse, passant de la sévérité à la tolérance la plus pure, impossible de ne pas s’attacher à ce héros malgré lui qui va devenir, comme le déclare sa femme lors du procès « le meilleur des hommes » avant de se retrouver martyrisé par les autorités belges jouant au jeu dangereux de l’Inquisition.

L’hypocrisie, un des thèmes principaux du film, est ici démontrée avec force, et s’avère cent fois plus choquante que les pratiques brutales subies volontairement par Magda.

Si le dernier acte, consacré au procès, est moins réussi, et que l’on regrette la maladresse d’une brève tentative d’explication inutile « justifiant » les désirs de Magda, on applaudira néanmoins le talent d’Erik Lamens pour sa direction d’acteurs impeccable, ainsi que pour sa sensibilité à parler de choses soi-disant choquantes (son film n’est pas timide en matière de détails visuels susceptibles de heurter les âmes sensibles) sans œillères et sans retenue.

Son SM-Rechter nous donne, une fois de plus, un bel aperçu de la bonne santé du cinéma flamand et de sa capacité à créer du divertissement intelligent, touchant et dépourvu de tout pathos malvenu.

 


Parlant de cul sans être faux-cul, SM-Rechter a beau s’inspirer d’une histoire vraie encore dans toutes les mémoires, son ton, sa tendresse et son courage en font, contre toute attente, un vrai beau petit film de cinéma susceptible d’encourager bien des vocations et de donner un joli coup de pouce à l’industrie du cuir.

 

Grégory Cavinato

 

http://www.cinergie.be/critique.php?action=display&id=1082


J'ai pu par la suite grâce à clochette trouver une autre critique un tantinet plus assassine du film... et comme j'essaie de faire preuve d'objectivité je vous la livre "brut de fonderie"...

Dans les années '90, Koen Arrousseau était connu de la population comme étant le 'sm-rechter', après qu'il ait été chopé en compagnie de sa femme dans des clubs assez louches.
Une affaire en justice a suivi, et le couple y perdit tout.
Le réalisateur débutant Erik Lamens a décidé de transformer cette histoire tragique en une amourette neuneu.
L'acteur vu dans 'Suspect', Gene Bervoets, interprète le personnage principal, alors que l'avocate de 'Recht op recht', Veerle Dobbelaere est sa femme.
Au générique, on retrouve d'autres célèbres acteurs flamands, comme Marie Vinck, Bruno Vanden Broucke ou encore Dirk Van Dijck.
Un beau rassemblement de talents (sur ce coup-là, il faudra nous croire sur parole), mais ici, on se demande ce qu'ils en ont fait, de leur talent.
Chaque fois qu'ils apparaissent, on a l'impression qu'ils font une audition pour l'une ou l'autre troupe de théâtre amateur.
Leurs dialogues déclamés avec exagération et leurs mains volant dans tous les sens suscitent régulièrement des moments - involontairement - comiques.
Ajoutez-y une overdose de perruques, de moustaches ouvertement postiches, un florilège de scènes sm honteusement mises en images, et des mouvements de caméras dignes d'une série télévisée flamande des années quatre-vingt, et vous saurez ce qu'il vous reste à faire... 

Par Steven Tuffin 

http://www.cinenews.be/Critics.Detail.cfm?ContentsId=13325&lang=fr

Ma critique :

Fin avril 2009, par chance et surtout en ayant réussi à booster "clochette" hors du lit, nous avons profité d'une visite au Kinepolis de Bruxelles pour visionner le film qui était toujours à l'affiche et cela presque un mois après sa sortie.
Deux séances en soirée, une salle avec un public dont certains avaient des signes presques ostentatoires de "reconnaissance" et clochette a été surprise de voir passer devant elle, une créature filiforme portant cuissardes et résilles.

Je dois dire que le film vu en version originale nous a fortement intéressé, par les images, par l'histoire et aussi par le questionnement qu'il en découlait.

Effectivement le jeu de certains acteurs étaient un peu forcé et les "moustaches" et autres "postiches" de piètre qualité (affubler un gamin de vingt ans d'une moustache à la "pandore" , d'un costume deux fois trop grand et encore amidonné, pour le rendre "redoutable", c'était pas une bonne idée...).

Mais la démarche et les caractères des personnages, le cadre de l'histoire, le fait qu'au final le fameux juge ne pratiquait que par "amour" et par "passion" vis-à-vis de son épouse a apporté un éclairage nouveau et différent sur cette "triste" affaire.

"Triste" surtout à cause de la réaction des autorités judiciaires belge, du "droit à la vie privée" et du fait que beaucoup se targuent d'une morale psycho-rigide pour mieux s'immiscer dans nos vies et nos modes de pensées.

Oui, ce film a quelques images qui sont fortes, mais aussi des images tendres...
Oui, ce film peut être une caricature du milieu "sm" (je ne m'explique pas pourquoi le seul "blaireau" de Maître est un ... francophone, dans le texte... cochette me dit que je fais mon "parano") mais aussi par l'apport de gens compétents, une vision plus humaniste et réaliste de ce qu'il est...

 

A noter que lors de la première du film, une séance de « shibari » fut organisé lors de la soirée de gala, séance organisée par les « conseillers » techniques du film, l’équipe de « beshibari », équipe qui avait presté lors de la fetish-night du 28 février à Bruxelles, comme quoi notre monde est petit…

 

www.beshibari.com

 

 

 

 





De la juridiction sur le droit et la pratique du « sadomasochisme » comme acte de torture et de barbarie :

 

http://www.imbroglio.be/site/spip.php?article80

 

Il existe ici et là des articles se rapportant à cette affaire sur des blogs divers de pratiquants « sm » mais en général ces articles sont des copier-coller (commentaires en plus…) d’un article publié sur wikipédia, article dont je n’ai pas trouvé la trace…

 


Mar 31 mar 2009 3 commentaires
Bonjour,
je suis le scénariste/réalisateur.
Merci de votre commentaire.
Juste une petite note - je trouve ça très drôle d'ailleurs... - le bourreau francophone est un fait qui vient de la réalité. La femme du juge a eu des coups dans son visage d'un client. Par hasard c'était un francophone... j'ai repris ça dans le film, c'est tout.
Je suis Bruxellois et le fait que le film ne joue plus à Bxl, c'est qu'il y a des raisons logistiques (comédien principale qui jouait à Amsterdam le soir).
Donc, malheureusement, ce petit rôle est la seule chose qui reste de mon esprit Belge. Dommage...
bien à vous
erik lamens
Erik Lamens - le 03/06/2009 à 01h45
... le film ne se déroule pas plus à Bxl (et en Français)... je voulais dire
Erik+Lamens - le 03/06/2009 à 01h46
Merci de votre commentaire sur ce sujet qui me tient à coeur.

Concernant la présence d'un Maître francophone et de son attitude assez caricaturale, il faut effectivement croire que cela est une "anecdote" tirée de l'histoire originale, donc relativement crédible.
Il est assez reconnu que d'un côté et de l'autre de la frontière linguistique, les échanges et contacts sont relativements nombreux.

-Concernant Bruxelles, mon regret est que le film très intéressant n'a pas été distribué en région francophone.
La seule possibilité pour nous a donc été de faire le voyage jusqque Bruxelles pour le voir en vo sous-titré en français (ce qui d'un autre côté ne m'a posé aucun problèmes).

J'espère simplement que lors de la sortie du film en DVD, il sera mieux distribué que via le réseau du distributeur "officiel".

Cordialement

Grand Nord
Grand Nord - le 04/06/2009 à 23h38